L'album du week-end - The Black Keys - Ohio Players

Les Black Keys renouvellent leur son avec des collaborations inédites.



Je vous mentirais si je vous disais que je n'attendais pas impatiemment la sortie de ce nouvel album. Il est d'ailleurs rafraîchissant de voir des artistes établis, comme les Black Keys, se réinventer et explorer de nouvelles voies créatives. Et c'est exactement ce qu'ils ont accompli avec ce Ohio Players. Le duo, composé du guitariste et chanteur Dan Auerbach et du batteur Patrick Carney, a longtemps été reconnu pour son approche brute et énergique de la musique, enracinée dans le blues garage. Pourtant, avec ce douzième album, ils ont choisi de briser leur routine habituelle en invitant une pléiade de talents pour enrichir leur son. Historiquement, le groupe a flirté avec divers genres et plusieurs collaborations, mais jamais à un niveau qui altère significativement la texture de leur musique. Ohio Players marque un tournant, avec une ouverture vers des influences et des styles divers, à travers l'intégration de musiciens additionnels qui n'avaient pas été présents en studio depuis leur retour en 2019. Cette décision semble être une réaction consciente contre la tendance psychédélique qui enveloppait leur précédent album "Turn Blue".



Ce dernier avait marqué une étape marquante dans leur évolution. Co-produit avec Danger Mouse, il a propulsé les Black Keys au-delà de leurs origines bluesy vers un son plus poli et expérimental. Ohio Players prend une direction différente, mettant l'accent sur une production soignée tout en restant fidèle à l'esthétique sonore fondamentale du groupe. Le duo évite l'exploration expansive de leurs albums précédents pour se concentrer sur des juxtapositions sonores intéressantes, s'appuyant sur les compétences qu'ils ont affinées au fil de leur carrière. Il en ressort un caractère à la fois familier et frais. Les riffs enveloppés de fuzz, les rythmes funky, et les harmonies caractéristiques du groupe sont complétés par des touches de hip-hop, grâce à la participation des rappeurs Lil Noid et Juicy J. Cette fusion des genres rappelle leur projet Blakroc de 2009, mais l'intégration consciente du hip-hop dans Ohio Players offre une nouvelle dimension à leur musique sans donner l'impression de répéter le passé.


La collaboration avec Beck se révèle être un élément clé de l'album (déjà parce qu'Odelay est un de mes albums culte), imprégnant plusieurs titres d'une énergie créative distinctive. La moitié des chansons portent sa signature, et son influence se ressent non seulement dans ses contributions vocales mais aussi dans l'ambiance générale du disque, qui oscille entre la densité d'Odelay et le neo-soul coloré de Midnite Vultures. Les Black Keys embrassent les expérimentations de genres sans ironie, restant ancrés dans l'âme de la soul classique, comme le démontre leur reprise de "I Forgot to Be Your Lover" de William Bell. Les autres collaborations, notamment avec Dan the Automator, Noel Gallagher, et Greg Cartwright, enrichissent l'album, lui conférant une cohérence surprenante malgré la diversité des influences. Chaque guest apporte une touche unique.


Après 23 ans d'existence, les Black Keys démontrent une fois de plus leur capacité à se réinventer tout en restant fidèles à leur essence. Ohio Players est un témoignage de leur évolution, offrant un mélange harmonieux de sons familiers et d'explorations nouvelles, le tout enrobé dans une production impeccable. Cet album est une invitation à les redécouvrir sous un jour nouveau, prouvant que même les groupes les plus établis peuvent surprendre et captiver leur audience avec audace.

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