Le mystère des trous noirs supermassifs enfin résolu ?
Le télescope James Webb révèle un monstre cosmique qui défie les lois de la physique.
Comment expliquer la présence de trous noirs supermassifs au centre de chaque galaxie ? Cette énigme qui tourmente les astronomes depuis des décennies vient peut-être de trouver sa réponse grâce au télescope spatial James Webb. Pendant longtemps, l'explication semblait simple: ces monstres cosmiques se formaient naturellement là où la concentration de matière était la plus élevée, c'est-à-dire au cœur des galaxies. Avec des milliards d'années à leur disposition, ils avaient tout le temps nécessaire pour se nourrir tranquillement de la matière environnante et atteindre des masses colossales. Mais cette théorie confortable a été mise à mal par les observations récentes. Plus nous regardons loin dans l'histoire de l'Univers, plus nous découvrons des trous noirs supermassifs très anciens. Le problème ? Le temps disponible pour leur formation devient de plus en plus court, ce qui implique qu'ils ont dû se développer beaucoup plus rapidement que prévu.
Une croissance théoriquement impossible
Il existe une limite théorique, appelée limite d'Eddington, qui définit la vitesse maximale à laquelle un trou noir peut absorber de la matière. Au-delà de cette limite, le rayonnement émis par la matière en chute devient si intense qu'il repousse le carburant potentiel, créant ainsi un mécanisme d'autorégulation. Les observations du télescope Webb ont révélé l'existence de trous noirs supermassifs si précoces qu'ils auraient dû pousser cette limite à son maximum pendant toute leur existence. Une situation peu probable qui laissait les scientifiques perplexes. C'est là qu'intervient une découverte fascinante, le télescope a repéré un trou noir, nommé LID-568, qui semble défier toutes les règles établies. Ce monstre cosmique se nourrit à un rythme 40 fois supérieur à la limite théorique, et ce depuis des millions d'années ! Situé dans une petite galaxie observable telle qu'elle était 1,5 milliard d'années après le Big Bang, celui-ci d'environ un million de masses solaires est particulièrement lumineux en rayons X. Cette luminosité exceptionnelle a d'abord été repérée par le télescope Chandra, avant que le Webb ne vienne apporter des détails cruciaux sur son environnement.
Un festin cosmique aux conséquences importantes
Les observations du télescope Webb ont révélé deux lobes de matière s'éloignant du trou noir à plus de 500 kilomètres par seconde, s'étendant sur des dizaines de milliers d'années-lumière. Ces structures témoignent d'une période d'activité intense qui aurait duré plus de 10 millions d'années. Les calculs suggèrent que ce trou noir aurait démarré avec une masse d'environ 100 fois celle du Soleil, probablement issu de l'effondrement d'une étoile massive. Il se serait ensuite retrouvé au cœur d'un nuage moléculaire géant, lui permettant de se gaver de matière à un rythme effréné pendant des millions d'années. Cette frénésie alimentaire aurait eu des conséquences importantes sur sa galaxie hôte, l'intense activité du trou noir aurait perturbé la formation des étoiles, expliquant pourquoi nous observons aujourd'hui certains d’entre eux très massifs au centre de galaxies relativement petites.
Une pièce du puzzle, mais pas la solution complète
Cette découverte pourrait résoudre en partie le mystère des trous noirs supermassifs précoces. Si l’un d’eux peut effectivement dépasser la limite d'Eddington d'un facteur 40 pendant une longue période, cela expliquerait comment certains autres ont pu grossir si rapidement dans l'Univers primitif. LID-568 semble cependant être un cas unique pour l'instant. Sur le graphique masse/luminosité des trous noirs supermassifs, il apparaît comme un point isolé. S'il en existait d’autres se nourrissant à ce rythme effréné, nous devrions en observer davantage. Les chercheurs continuent donc leur quête, scrutant d'autres sources de rayons X à la recherche d'objets similaires. Cette découverte ouvre peut-être la voie à une meilleure compréhension de la formation des structures les plus massives de notre Univers, tout en soulevant de nouvelles questions fascinantes sur leur évolution.